Editorial: Quelles leçons tirées de l’échec du candidat tchadien aux élections à la présidence de la BAD?

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Jareth BEAIN : Directeur de Publication de Tchad Eco

Ça y est!!! Les nouvelles tant attendues sont tombées le 28 Mai 2015 au palais de congrès de Sofitel Hôtel Ivoire d’Abidjan en Côte d’Ivoire. Oui, plusieurs mois durant pour ne pas dire années, le Tchad s’était lancé dans la course pour le fauteuil présidentiel de la BAD en présentant son candidat Bedoumra KORDJE. Tant le profil du candidat tchadien, le projet qu’il portait et l’aura du pays sur la scène internationale portaient à croire, peut-être là notre naïveté, que le Tchad et son candidat allaient remporter cette élection. Que s’est-il donc passé ce 28 Mai 2015?

Le candidat tchadien, faut-il le noter, a eu durant les six tours de vote, le soutien sans faille de ses deux fidèles alliés du bloc de l’Afrique de l’Ouest que sont la Mauritanie et le Niger; de certains pays de la CEMAC et de quelques pays d’autres blocs régionaux tels que la Libye, l’Algérie, le Soudan et le Djibouti. Au premier tour de vote, le candidat tchadien a réalisé un score de 11,6% du vote total, soit 18,51% du vote régional et 0% du vote des pays non africains. Il est important de relever que c’est au troisième tour du vote que l’Italie a été le premier pays non africain à voter pour le Tchad. Nous sommes en droit de nous demander où étaient passés donc les partenaires historiques non africains du Tchad durant ce vote? Bien qu’au sixième tour, les Etats-Unis, l’Italie, l’Arabie Saoudite et le Koweït sont les pays non africains à voter pour le candidat tchadien, le candidat nigérian Akinwumi ADESINA arriva en tête avec 58,10% du vote total, le candidat tchadien Bedourma KORDJE occupa le deuxième rang avec 31,62% et la candidate capverdienne Christina DUARTE, troisième avec 10,27%. Le candidat tchadien perdit ainsi le poste tant convoité par les huit candidats en lice.

Quelles sont les leçons à tirer de ces élections? D’abord, il faut souligner que des considérations géopolitique et géostratégique étaient omniprésentes pendant ces élections. Bedoumra KORDJE n’a pas démérité, loin de considérer les qualités et le profil de chaque candidat, ces résultats ont démontré que seules les qualités personnelles du candidat ne peuvent dicter l’issue de ces élections. Considérant ceci, ce fiasco interpelle-t-il le Tchad à recadrer sa politique étrangère? Vu sous cet angle, le poids économique du Nigéria comparativement au Tchad ne pourrait qu’inciter les puissances occidentales à voter en sa faveur. Malgré cela, les Etats-Unis d’Amérique ont quand même voté pour le Tchad au sixième tour de vote, acte louable en soit.

Le Tchad pensait bénéficier du soutien de ses partenaires occidentaux et africains en rétribution de son engagement dans la lutte contre le terrorisme et surtout son rôle majeur dans le maintien de la paix sur le continent noir. Car pour les sacrifices consentis au Mali et au Nigéria, le Tchad pensait pouvoir gagner un parrainage en guise de reconnaissance de la part de ces pays et de la communauté internationale. Malheureusement, ce n’était pas le cas. Loin de remettre en cause ces interventions en raison du haut risque de régionalisation du terrorisme qui obérerait l’économie tchadienne, l’échec du pays pourrait signifier que seules les interventions militaires à répétition ne suffisent pas pour gagner l’adhésion de ses partenaires. Mais peut-être il faudrait les appuyer autrement par une politique étrangère pragmatique et ingénieuse.

Loin de remettre en cause ces interventions en raison du haut risque de régionalisation du terrorisme qui obérerait l’économie tchadienne, l’échec du pays pourrait signifier que seules ces interventions militaires à répétition ne suffisent pas pour gagner la voix des partenaires. Mais peut-être il faudrait les appuyer autrement par une politique étrangère pragmatique et ingénieuse.

Bien que le Tchad ait connu un échec, et d’ailleurs c’est la règle du jeu électoral, ces élections, faut-il le relever, ont eu un impact positif sur le Tchad. La campagne aura permis au pays d’avoir une visibilité plus importante sur la scène internationale autrement que par le succès de ses interventions militaires. La plupart des Tchadiens étaient unis autour de la candidature de notre compatriote Bedoumra KORDJE. De même, le candidat Bedoumra KORDJE, pour soutenir sa candidature à la BAD, a entrepris de multitudes reformes aux fins d’assainir les finances publiques. Ces réformes ont eu assez d’impacts positifs sur le Tchad et l’une des conséquences est l’atteinte du point d’achèvement de l’Initiative des Pays Pauvres Très Endettés (IPPTE).

En effet, le Tchad est le 36ème et dernier pays à atteindre le point d’achèvement de l’IPPTE. Il a accueilli le 28 Avril dernier cette nouvelle qu’il attendait depuis 2001, date à laquelle le pays avait atteint le point de décision de cette initiative. Quelles sont alors les retombées attendues?

L’avantage direct de l’atteinte du point d’achèvement de l’IPPTE est l’annulation de la dette du Tchad à hauteur de 1,1 milliard de $ US. Le deuxième avantage est que l’atteinte de ce point d’achèvement est considérée aux yeux de la communauté internationale comme un signal de la bonne gouvernance économique. Cela permettrait au pays de se rendetter pour juguler la chute des prix du baril de pétrole et de financer ses secteurs sociaux. Enfin, le Tchad pourrait gagner en crédibilité et en image aux yeux de la communauté internationale, ce qui est favorable pour attirer les Investissements Directs Etrangers.

Comme nous l’avions annoncé dans nos précédentes lignes éditoriales, votre bimestriel Tchad Eco consacre largement cette 6ème parution à l’atteinte du point d’achèvement de l’IPPTE par le Tchad en analysant ses enjeux afin d’aider sans doute les pouvoirs publics dans leur mission. Il propose aussi des outils de base pour permettre aux lecteurs de comprendre techniquement et de manière simplifiée la question de la dette et les différents aspects de l’IPPTE en elle-même.

Pour télécharger : TchadEco N° 6 du 1er Juillet au Août 2015

Jareth BEAIN

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