Accord de partenariat économique entre l’union européenne et la zone CEMAC : quels enjeux pour l’économie tchadienne ?

L’objectif de cette étude menée dans le cadre de la Semaine du débat économique (SEDECO) sur l’état de  lieu des APE sur le contient africain organisé par l’université de Ouagadougou  était de mettre en évidence les enjeux des accords de partenariat économique (APE) entre l’Union Européenne (UE) et le Tchad. Plus particulièrement, l’étude visait dans un  premier temps à mettre en évidence l’impact de l’application de ces accords sur l’économie tchadienne. Dans un second temps, il était question d’orienter et d’éclairer les décideurs de politiques économiques sur les actions à mener pour une application optimale des APE afin que celles-ci soient bénéfiques pour le pays.  L’analyse de données a permis d’identifier les différents produits d’importations et les estimations économétriques  basé sur une simulation du modèle d’équilibre partiel nous ont permis d’apprécier l’impact de l’application des APE sur l’économie tchadienne.Transporteurs

Ces analyses aboutissent à la conclusion selon laquelle l’impact des APE sur l’économie tchadienne s’observe sur les finances publiques et les échanges extérieurs. Au niveau budgétaire les estimations font apparaître en moyenne et par année budgétaire, des pertes fiscales de l’ordre de 90 Milliards de FCFA par l’Etat tchadien du fait d’une organisation fiscale ineffective, cette tendance pourra s’accélérer avec l’afflux de revenus autres que fiscaux, dont la facilité de collecte et l’abondance pourraient compromettre tout effort de réorganisation de la gestion du pays et du système fiscal.

L’étude montre aussi que l’inflation est  très élevée, car la majeure partie de la population se retourne vers le pétrole identifié comme secteur porteur de l’économie Tchadienne. Les autres secteurs c’est-à-dire le commerce, l’élevage, le petit commerce, l’agriculture pourraient a moyen terme devenir des secteurs marginaux, ceci pourrait réduire la capacité d’offre du Tchad sur le marché par rapport à la demande des produits et services.

L’étude a aussi permis de relever que sur la base des principales importations du Tchad en provenance de l’UE, et en ciblant 22 produits : 16 secteurs sur lesquels l’avènement d’une zone de libre-échange entre l’UE et le Tchad aura soit un impact positif ; soit négatif d’un point de vue économique. 14 filières à partir desquelles le Tchad peut bâtir une véritable stratégie d’accroissement de l’offre de biens et services dont ses populations ont besoin dans des conditions de compétitivité relativement normale. Ces secteurs sont listés dans le tableau ci-dessous.

Tableau 1 : Secteurs faisant l’objet de l’accord de libre-échange entre l’UE et le Tchad

  • Filière énergétique,
  • Filière des industries de produits pharmaceutiques,
  • Filière de l’eau,
  • Filière des céréales et féculents,
  • Filière de la Communication,
  • Filière du Transport,
  • Filière de l’Agriculture,
  • Filière des industries agroalimentaires,
  • Filière des Nouvelles Technologies de l’Information et de la Communication (NTIC),
  • Filière de l’Elevage,
  • Filière des Mines,
  • Filière du Coton,
  • Filière de l’Electroménager,
  • Filière Brassicole.

Par contre dans le secteur du textile et de l’habillement : toute suppression des droits de douane sur les produits textiles pourrait entraîner la disparition pure et simple de ce secteur et  rend encore plus difficile une possibilité de diversification du coton tchadien. Ce constat concerne aussi les produits laitiers et les préparations alimentaires :

Supprimer les droits de douane sur les importations  reviendrait à éliminer toute possibilité de concevoir et de mettre en place des structures de production laitière à même de satisfaire la demande des populations tchadiennes, alors même que le pays dispose du cheptel bovin le plus important de la sous région Cemac. En ce qui concerne, les sous-produits des brasseries, la disparition des droits de douane sur ces derniers fragiliserait le sous-secteur relativement embryonnaire au Tchad même si les importations de ces sous-produits en provenance de l’UE sont manifestement peu importantes.

Pour un ensemble de produits englobant les biens d’équipement, de consommation intermédiaire, de consommation finale, il serait nécessaire de retarder la libéralisation des échanges (pendant une période de 5 ans). Le gel pour un certain temps de la libération de l’échange de ces produits est justifié par le faible développement de ces secteurs. En effet, le gel de la libéralisation permettrait de minimiser les effets de la concurrence étrangère, ce qui permettrait aux industries locales de s’adapter face à la concurrence étrangère. Enfin le maintien de taxes à l’importation de ces produits permettrait à l’Etat d’engranger un peu plus de recettes douanières

Œuvrer à la diversification du tissu de production industrielle du pays en dégageant 10% des recettes pétrolières sous forme de fond de diversification sera la meilleure stratégique pour le pays ,en effet le pays est fortement tributaire du pétrole avec un déficit structurel estimé à -20,1% en 2010 ainsi que Les variations des prix du baril sur le marché international qui a secoué l’économie du pays nous montre l’urgence de l’application de cette stratégie. Il est impératif de miser sur le secteur primaire qui est le seul secteur capable d’avoir des effets d’entrainements sur le reste de l’économie. La maitrise de l’eau à travers la construction de barrage dans les régions greniers du Tchad serait judicieuse cela permettra non seulement de pratiquer une agriculture intensive avec la possibilité de résoudre le problème de l’auto suffisance alimentaire mais aussi résoudre le problème de source d’approvisionnement en eau pour les cheptels. Dans le contexte actuel l’état ne pourra plus a moyen terme absorber le flux de jeunes diplômés ainsi l’etat doit encourager et accompagner le développement du secteur privé et la création des PMI/PME qui est solution au problème du chômage des jeunes.

Le désenclavement du pays est une priorité car cela freine aussi bien les importations mais aussi les exportations de biens, le bitumage des axes importants surtout ceux menant des greniers agricoles vers les marchés devrait aussi être prioritaire.

Comme toute étude, celle-ci s’est heurtée à des difficultés en lien avec le manque de données sur la thématique, et des données actualisées sur les exportations et importations du pays.

 Sans titre

A propos de l’auteur: Macro économiste avec une spécialisation en gestion du développement, TELIMSEIN KEM-MADJE Erick a participé à plusieurs travaux de recherche et de consultations. Il a participé entre autres à l’étude sur la soutenabilité des finances publiques du Tchad à l’ère pétrolière (2000-2010) ; sur « L’hommage à l’Armée Nationale Tchadienne: la nouvelle donne face au terrorisme en Afrique» dans le cadre de la  Conférence internationale organisée par l’IRSEM à Paris sur Les nouveaux visages des armées africaines ; à l’étude portant sur le secteur informel dans les économies africaines. Actuellement, il mène une analyse sur la problématique d’un développement soutenable des économies de la zone CEMAC au Laboratoire d’Analyse des Politiques Economiques (LAPE) de l’Université de Ouagadougou au Burkina Faso.

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire