Au Tchad comme partout dans le monde, l’importance de la femme dans la promotion du développement n’est point à démontrer. Epouse et mère, elle s’occupe de la plus grande partie des tâches du ménage et assure l’éducation des enfants. Première à se réveiller et dernière à se coucher, la femme joue un rôle très important dans la société.
Jadis, considérée comme ménagère et « machine à fabriquer des enfants », la femme des Pays en Développement (PED) en général et celle de l’Afrique en particulier, a été longtemps marginalisée. Dès lors, elle a été exclue du système de production et participe très peu ou presque pas à la prise des décisions. Devant cette situation, les opportunités économiques lui sont trop restreintes, elle fait donc face aux faibles revenus et au manque d’accès aux moyens de production. Ce qui crée un grand fossé entre elle et l’homme, entrainant la féminisation de la pauvreté (70% des pauvres des PED sont des femmes alors qu’elles ne représentent que la moitié de la population de ces pays, Moghadam, 2005). Et pourtant, autonomiser la femme pourrait alimenter des économies florissantes, ce qui entraînerait des gains de productivité afin de booster le niveau de la croissance inclusive.
Devant ce constat amer, le monde moderne voudrait considérer la femme autrement en lui accordant une place non négligeable dans le concert des nations. C’est ainsi que l’Assemblée Générale de l’Organisation des Nations Unies a créé en Juillet 2010, une entité appelée ONU Femmes, spécialement consacrée à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes. Cette organisation onusienne intervient au plan mondial pour rendre concret l’ambition fixée dans les Objectifs du Développement Durable (ODD) en son cinquième axe où cinq domaines prioritaires sont retenus : renforcer le leadership des femmes et leur participation ; mettre fin à la violence à l’égard des femmes ; intégrer les femmes dans tous les aspects des processus de paix et de sécurité ; renforcer l’autonomisation économique des femmes ; et en fin, placer l’égalité des sexes au cœur des processus de planification et de budgétisation au niveau national.
Sur le plan national, le Tchad n’est pas resté en marge de la dynamique vers l’autonomisation de la femme. En effet, des initiatives nationales telles que la création d’un Ministère dédié à la femme ; la responsabilisation des femmes à des plus hautes fonctions dans les structures de l’Etat (24,47% des femmes ministres et 12,73% des femmes parlementaires) ; la construction de la Maison de la Femme ; la promotion de l’entrepreneuriat féminin ; le projet portant sur le dividende démographique, etc. témoignent de la place importante qu’accorde le pays à l’autonomisation de la femme.
Toutefois, les résultats de ces efforts restent mitigés à cause des pesanteurs socioculturelles. A titre d’exemple, les résistances à l’adoption du code des personnes et de la famille constituent toujours un frein au processus d’autonomisation de la femme. Aussi, selon les données du Ministère tchadien de l’Education nationale, en 2013, les filles sont moins scolarisées que les garçons et quittent prématurément le système scolaire à cause du mariage précoce et autres causes liées aux surcharges des travaux domestiques. De même, 86% des femmes tchadiennes sont analphabètes contre 69% des hommes. Ce phénomène est très accentué dans le monde rural alors que la population féminine rurale est estimée à 40% de la population totale. Ce qui contribue au fort taux de pauvreté dans les zones rurales au Tchad.
Pourtant, il est important de relever que la lutte efficace contre la pauvreté au Tchad passe nécessairement par l’amélioration des conditions de vie des femmes. Car d’une part, 50,61% de la population tchadienne est constituée des femmes et d’autre part, leur efficacité dans la lutte contre la pauvreté est prouvée par plusieurs études empiriques. Ainsi selon les résultats d’ECOSIT 3, les ménages dirigés par les femmes présentent un taux de pauvreté plus faible (42,6%) que ceux dirigés par les hommes (47,4%). Dans le domaine agricole, sur les 2/3 de mains d’œuvre du secteur, les femmes occupent plus de la moitié.
Ces statistiques montrent combien de fois la femme occupe une place de taille dans la lutte contre la pauvreté au Tchad. Marginaliser la femme et l’exclure du système de production pourraient être considérés comme un acte « anti-développement ».
Votre Trimestriel Tchad Eco dans sa quinzième parution traite spécialement du rôle de la femme dans le processus de développement. Il s’intéresse, à cet effet, aux parcours de trois femmes tchadiennes qui, par leur style de leadership, de management et surtout leur culture entrepreneuriale, contribuent positivement au développement de leur communauté et par conséquent de leur pays. La valorisation de leur success stories pourrait être utile pour impulser le désir de leurs cadettes à emboiter leurs pas. Nous souhaitons bonne lecture à toutes et à tous.
Jareth BEAIN
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