Un certain regard du développement

« Mountain Devil Lizard Dreaming (Winter storm) », Kathleen Petyarre, fin XXème siècle, musée du Quai Branly. Les peintres descendants des natifs des îles d’Australie, ou aborigènes, ont tendance à utiliser la technique du pointillisme pour illustrer leur vision du monde, qui est un singulier mélange de représentations de formes concrètes (ici la texture d’une écaille) et de symbologie des rêves (le lézard comme objet signifiant). Ou comment le matérialisme et le spiritualisme ne font qu’un.

« Mountain Devil Lizard Dreaming (Winter storm) », Kathleen Petyarre, fin XXème siècle, musée du Quai Branly.  Les peintres descendants des natifs des îles d’Australie, ou aborigènes, ont tendance à utiliser la technique du pointillisme pour illustrer leur vision du monde, qui est un singulier mélange de représentations de formes concrètes (ici la texture d’une écaille) et de symbologie des rêves (le lézard comme objet signifiant). Ou comment le matérialisme et le spiritualisme ne font qu’un.
« Mountain Devil Lizard Dreaming (Winter storm) », Kathleen Petyarre, fin XXème siècle, musée du Quai Branly.
Les peintres descendants des natifs des îles d’Australie, ou aborigènes, ont tendance à utiliser la technique du pointillisme pour illustrer leur vision du monde, qui est un singulier mélange de représentations de formes concrètes (ici la texture d’une écaille) et de symbologie des rêves (le lézard comme objet signifiant). Ou comment le matérialisme et le spiritualisme ne font qu’un.

Tout au long de son œuvre et de sa vie, Nietzsche a défendu la pensée tragique. Selon lui, on doit aux Grecs d’avoir développé cette forme de pensée en Occident, qui se traduit dans l’art, et notamment dans la musique et le théâtre et qui régule la vie de la cité. L’esprit tragique est celui de l’acceptation de la vie telle qu’elle est, et non telle qu’elle devrait être. Pourtant, on va le voir, il est tout sauf évident de porter un regard tragique sur le monde qui nous entoure, et c’est en cette capacité que se distingue véritablement le surhomme nietzschéen du reste de l’humanité.

Notre histoire commence avec celle d’un révolutionnaire. Pas un activiste politique, ni un dirigeant politique, mais un homme de science, au parcours académique impeccable. Même s’il reste un intellectuel confidentiel pour le grand public, on peut avancer que son œuvre à des incidences concrètes plus importantes que le Capital de Karl Marx. Il s’agit du défunt Thomas Samuel Khun, philosophe des sciences américain. Dans La Structure des Révolutions Scientifiques, publié en 1962, Thomas nous indique que la science n’est pas une accumulation de savoir, mais que sa nature même évolue au cours de l’Histoire avec un grand « H ».

En effet, l’anthropologie et la sociologie contemporaine ont montré que nos structures sociales, nos modes de vie, nos spiritualités, nos us et coutumes et nos lois sont dépendants des histoires que nous nous racontons. Pour prendre un exemple quasi-universel dans nos sociétés post-modernes, l’immense majorité d’entre nous adopte un comportement d’accumulation de capital (entendu dans le sens de l’argent), car nous nous sommes convaincus que celui-ci possède une valeur, qui définira notre niveau de vie et qui nous permettra d’obtenir ce que nous désirons. Or le billet de banque, n’est rien d’autre qu’un bout de papier, la pièce de monnaie, un bout de métal et le compte en banque, un jeu de chiffres virtuel, sans aucune réalité tangible.

Or le billet de banque, n’est rien d’autre qu’un bout de papier, la pièce de monnaie, un bout de métal et le compte en banque, un jeu de chiffres virtuel, sans aucune réalité tangible.

Mais pourquoi avons-nous besoin de nous raconter des histoires ? La biologie évolutive a démontré que notre capacité à comprendre le monde qui nous entoure est limitée par le développement de notre boîte crânienne et de notre cerveau (du moins jusqu’à ce que nous fusionnions, notre esprit avec des machines, dans un probable avenir). Même si le champ de l’interconnexion neuronale fait preuve d’un dynamisme évident, le champ actuel de notre connaissance pousse donc à supposer que pour expliquer le monde complexe qui nous entoure, nous avons besoin d’un modèle simplifié, qui offre une certaine représentation, pour pouvoir tenter de le comprendre. Lorsque ce modèle est adopté par un grand nombre de personnes, on l’appelle un paradigme. Ce paradigme c’est donc une lunette de vue, partagée par tous ou presque, et qui offre un regard déformant sur le monde qui nous entoure.

 Il est alors normal que les paradigmes évoluent avec l’esprit du temps, ou zeitgest. Ces évolutions sont malheureusement souvent violentes, elles se produisent lorsque le paradigme devient incapable d’expliquer ce qui se passe. C’est particulièrement vrai en sciences. Pour prendre l’exemple de l’économie du développement, il existe une guerre de tranchées académique entre ceux qui pensent que le destin d’une nation et de ses peuples dépend principalement de sa géographie et de ses dotations, ou ceux qui stipulent que ce sont leurs choix, leurs cultures leurs institutions qui comptent. À l’heure des nouvelles technologies de l’information et de la communication et du social network, le développement se comprend de plus en plus comme la capacité à nous organiser en réseaux pour concrétiser ce que nous sommes capables d’imaginer de plus extraordinaire, comme l’intelligence artificielle au service du plus grand nombre. Peut-être demain aurons-nous une autre vision du développement de plus en plus ancrée sur les concepts d’auto-organisation, et d’entropie/néguentropie. Par là même, nous pourrions peut-être voir un dépassement des approches top-down, ou bottom-up conventionnelles, grâce à la prise en compte des phénomènes d’interactions réciproques et multiples, et du principe de feedback, dans les analyses scientifiques. Dans tous les cas, je pense qu’il est nécessaire de prendre du recul par rapport à notre propre situation et de bien nettoyer nos lunettes avant d’ausculter le développement en tant qu’objet d’étude. Un geste tragique, en somme.

Pour étudier et appréhender la question du développement, l’expérience personnelle sert de référentiel conceptuel, mais également de marqueur de l’acmé, qui est le point culminant dans la vie intellectuelle de tout à chacun. Elle est donc essentielle. Cela dit, je conseillerais la lecture de l’Aide Fatale, (Moyo, 2009), de The Dragon’s Gift (Brautigam, 2010, non traduit en français), ainsi que l’Histoire de l’Afrique, des Origines à nos Jours (Lugan, 2009), qui constituent d’excellents points de départ pour mieux comprendre les enjeux et défis qui se posent aux nations et peuples d’Afrique Sub-saharienne, en ce premier quart du XXIème siècle.

Pour aller loin, …

Brautigam, Deborah, 2010. The Dragon’s Gift. The Real Story of China in Africa. Oxford University Press.

Khun, Thomas Samuel, 1962. La Structure des révolutions scientifiques. Champs sciences.

Marx, Karl, 1867. Le Capital (livre I). Quadrige, PUF.

Moyo, Dambisa, 2009. L’aide fatale : Les ravages d’une aide inutile et de nouvelles solutions pour l’Afrique. Broché.

Nietzsche, Friedrich, 1862. Naissance de la Tragédie. Folio essais.

Lugan, Bernard, 2009. Les Origines de l’Afriques, des Origines à nos Jours. Broché.

Sazdqesdfhjgfns titrsdfqsePierre Mandon : doctorant en économie du développement au Cerdi et à l’Université d’Auvergne. Travaille sur la compréhension de l’économique sous le regard du politique.

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