Le marché du ciment au Tchad : pourquoi le prix est-il si élevé ?

Pourquoi le prix du ciment au Tchad est si élevé alors qu’il est abordable dans les pays limitrophes ? Un sac de ciment de 50 Kg coûte 11 000 FCFA au Tchad contre 4400 au Cameroun voisin, 3000 FCFA au Sénégal et 5500 FCFA au Gabon. Cette question, les tchadiens se l’ont posé de millions de fois en raison de sa hausse considérable depuis la fin des années 1990. Le citoyen ordinaire en est arrivé à se poser la question de savoir qu’est-ce que le gouvernement entreprend afin de faire baisser le prix d’un matériau aussi essentiel pour tous ceux qui ambitionnent de se construire un logement décent ? Cet article répond à cette question sur la base d’une analyse de l’évolution du marché du ciment au Tchad. Sans titresdf

Vue partielle de la cimenterie de Baoré. Source : alwhida info

Evolution de l’offre de ciment

Du côté de l’offre, le marché du ciment au Tchad est dominé par la Société Nationale du Ciment (SONACIM) installé en 2011 à Baoré dans la région du Mayo-Kebbi Ouest à quelques encablures de Pala. Cette usine d’un coût estimé à 46 milliards de FCFA est le fruit d’un partenariat entre le Tchad et la Chine via un prêt consenti par EximBank China. Elle dispose d’une capacité de production de 200 000 tonnes par an.

La production de cette usine ne permettant pas de couvrir la demande nationale estimée à plus de 700.000 tonnes par an, le gap est comblé par les importations en provenance du Cameroun (CIMENCAM) et du Nigéria (DANGOTE). Consciente de la non satisfaction de la demande qui est à l’origine de la spéculation autour du prix du ciment, le gouvernement a procédé en juin 2014 et en mars 2016 aux lancements des travaux de construction de deux nouvelles usines afin d’accroitre l’offre de ciment sur le marché national.

La seconde cimenterie qui verra le jour à proximité de N’Djamena est le fruit d’un partenariat entre le groupe marocain Addoha. Elle s’étalera sur une superficie de 10 hectares et les travaux devront durer 18 mois. Sa capacité de production est estimée à 500 000 tonnes par an, ce qui devrait contribuer à satisfaire la demande locale.

La troisième cimenterie en construction est située à Ngara, toujours dans la région du Mayo-Kebbi Ouest. Elle disposerait d’une capacité de production de 500 000 tonnes la première année extensible à un million par an à partir des années suivantes. D’un coût total de 30 milliards de FCFA, la phase de construction devra s’étaler sur 12 mois.

A terme, l’offre globale de ces trois usines qui se situe autour de 1,7 millions de tonnes par an permettrait de couvrir la demande locale (700 000 tonnes /an) qui devrait baisser en raison de la baisse des investissements publics.

A terme, l’offre issue de ces trois usines qui se situe autour de 1,7 millions de tonnes permettrait de couvrir la demande locale (700 000 tonnes /an) qui devrait baisser en raison de la baisse des investissements publics. .

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La demande de ciment et les raisons de la spéculation autour de son prix

La demande de ciment au Tchad a connu une hausse significative au début des années 2000 en raison des activités de construction du pipeline Tchad-Cameroun tout d’abord et ensuite par la hausse du niveau des investissements publics. En effet, sur la période 2000-2013, l’investissement public approximé par la formation brute de capital fixe (FBCF) représentait en moyenne 25,7% du PIB contre 6,3% sur la période 1992-1999. La hausse des investissements résulte principalement de la hausse de l’investissement privé (19% sur la période 2000-2013 contre 1,7% entre 1992-1999). L’investissement privé inclut également ceux du secteur pétrolier qui se sont accrus considérablement.

C’est donc la hausse de la demande publique et privée qui est à l’origine de la hausse du prix du ciment. En effet, le boom pétrolier qu’a connu le pays a entrainé des changements dans l’utilisation des matériaux de construction. Avant le début des années 2000, l’usage du ciment comme matériau de construction était encore réservé à une minorité de tchadiens en raison du faible pouvoir d’achat. Ce qui a radicalement changé avec l’avènement de l’exploitation pétrolière expliquant du coup la hausse vertigineuse de la demande de ciment.

La hausse de la demande publique (+55% entre les deux périodes) s’explique quant à elle par la hausse de la consommation dans le cadre des grands travaux d’infrastructures dans les secteurs prioritaires.

Sansshjf titresdsdgsdfSource : BEAC

Bien que pouvant expliquer de façon marginale la hausse du prix du ciment, la spéculation des commerçants peut être l’une des causes de la hausse des prix. L’ampleur de cette spéculation a été mise en évidence lors de la mise sur le marché du ciment produit par la SONACIM. En effet, le prix de vente au consommateur final du sac de 50 kg fixé à 6 500 FCFA par le gouvernement (pour un prix sortie d’usine de 4.200 FCFA) n’a jamais été respecté. Les spéculateurs ont créé une pénurie artificielle conduisant à une explosion du prix. Résultat : le sac de ciment se négociait à 11 500 FCFA dans les quincailleries de la capitale.

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 Source : alerte-info.net/

L’ampleur de la cette spéculation a été mise en évidence lors de la mise sur le marché du ciment produit par la SONACIM. En effet, le prix de vente au consommateur final du sac de 50 kg fixé à 6500 FCFA par le gouvernement (pour un prix sortie d’usine de 4.200 FCFA) n’a jamais été respecté. Les spéculateurs ont créé une pénurie artificielle conduisant à une explosion du prix. Résultat : le sac de ciment se négociait à 11 500 FCFA dans les quincailleries de la capitale.

 

Recommandations en vue d’une meilleure régulation du marché du ciment.

La mise en exploitation des deux nouvelles usines qui viendront accroitre l’offre nationale (1,7 millions de tonnes) permettra de satisfaire largement la demande estimée à 0,7 millions de tonnes. La baisse du prix du ciment qui en résulterait devrait entrainer un accroissement de la demande car de nombreux ménages estimeront que la baisse des prix leur permettrait de réaliser des constructions plus durables. Ce qui à terme contribuera à l’embellissement des centres urbains du pays et à l’amélioration des conditions de vie.

Pour que cette hausse de l’offre de ciment puisse être profitable à tous, le gouvernement tchadien devrait veiller à diminuer le nombre d’intermédiaires entre les usines et les consommateurs finaux, ce qui réduirait les marges et du coup le prix final.

La baisse du rythme des investissements publics constaté fin 2014 et qui devrait durer encore quelques années devrait permettre aussi de faire baisser le prix du ciment. L’association de défense des consommateurs (ADC) et l’Etat devraient veiller à ce que les prix finaux officiels soient respectés par les acteurs du secteur pour l’intérêt général.

Guy DABI

 

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